samedi 2 mars 2013

Right Now - Deus Ex: Human Revolution

Comme souvent, je m'attaque à un jeu récent, bien après sa sortie. L'avantage, outre un prix réduit (ou carrément gratuit ici, merci Playstation Plus), c'est de savoir si on a affaire à un jeu de qualité, reconnu et recommandé par pas mal de monde. Quitte à passer des dizaines d'heures sur un jeu, autant le faire en bonne compagnie. Et ici, Deus Ex HR (pour faire court) présentait de belles lettres de recommandation dès sa sortie en Août 2011 et s'affichait dans les tops de fin d'année.
Deus Ex Solid
Les choses s'annonçaient tout de même difficiles, n'ayant jamais joué aux premiers titres Deus Ex (HR étant un préquel) et n'étant pas forcément un adepte de l'infiltration à la Metal Gear Solid. Mais heureusement, le jeu emprunte de nombreux éléments à des genres différents (FPS, jeux de réflexion, exploration, RPG entres autres), met en place un univers qui peut être plus ou moins creusé (selon le temps disponible ou la patience du joueur) et laisse une relative liberté dans le style de jeu adopté.

Pour situer rapidement l'histoire: 2027, le joueur incarne Adam Jensen, un ex-flic reconverti en responsable sécurité dans une boîte spécialisée en augmentations cybernétiques, où accessoirement travaille son ex Megan Reed. Après une courte présentation des locaux et une discussion avec le patron de la boîte, une attaque met à feu et à sang (littéralement) les laboratoires, laissant Jensen en piteux état après avoir (re)perdu son ex dans la bataille. Retapé façon Steve Austin par son patron, Jensen revient 6 mois plus tard pour être renvoyé sur le terrain, tout en cherchant la vérité sur cette attaque qui a changé sa vie.
Sur cette base qui appelle des révélations plus ou moins prévisibles, Jensen, et par extension le joueur, se retrouve à suivre en parallèle une quête personnelle (qu'est-il arrivé à Megan?) et des affrontements industriels et idéologiques. Au fil des rencontres et situations, le joueur est amené à prendre des décisions aux impacts plus ou moins lourds, que ce soit pour la survie d'un otage ou ses opinions sur les augmentations. Il s'en dégage une lecture à deux niveaux, où l'on peut s'attacher à la forme et au jeu en lui-même (traverser les niveaux, battre les boss, remplir les quêtes) ou au fond et aux thématiques (l'évolution humaine, le libre arbitre, l'impact des médias). La grande réussite de Deus Ex HR est de proposer un contenu riche qui couvre ces deux niveaux de lecture, en proposant une expérience de jeu à la fois ludique et intelligente.

Côté forme, le titre ne se limite pas à l'infiltration, mais propose de nombreuses approches face à une même situation: la traversée d'une zone peut être réalisé de manière furtive, en esquivant les gardes et caméras, en utilisant les conduits d'aération ou en se cachant derrière des caisses. Ou en éliminant à mains nues les ennemis, cachant leurs corps ou les utilisant comme appât pour monter un piège et en éliminer d'autres. Ou en manipulant les terminaux de sécurité pour retourner les tourelles contre ses adversaires. Ou tout simplement en faisant parler la poudre, que ce soit en jouant les snipers ou les Charles Bronson au fusil à pompe. Au fil des éliminations et missions, on récupère des points d'expérience, qui permettent d'augmenter les compétences de Jensen en hacking, furtivité ou combat, selon sa stratégie de jeu. Seuls les combats avec les boss passent par la force brute: dommage, il aurait été intéressant de pouvoir réaliser une neutralisation furtive façon bras déboîté, ou discuter philosophie pour les pousser à déposer les armes.
Visuellement, le jeu bénéficie d'une belle esthétique cyberpunk, entre les décors (des laboratoires high-tech immaculés aux bas fonds crades des mégalopoles), les costumes et prothèses des personnages et les teintes jaunes omniprésentes, semblant traduire la pollution et l'asphyxie d'un monde qui ne voit plus la lumière naturelle du jour. Très cinématographique, on devine des références à Ghot in the Shell (les interfaces câble homme-machine), Blade Runner (les stores dans l'appartement de Jensen, les néons dans Hengsha) ou Tron (pour la musique et le clin d'oeil aux motos).
Le whisky: bon pour l'énergie, mauvais pour la vision.
Côté fond, à la manière des méthodes d'approche d'une zone, le titre n'impose pas de ligne pré-établie: le joueur peut résoudre les conflits façon Mahatma Gandhi ou John Rambo, et surtout se positionner dans le débat sur les augmentations. Sur la base des nombreuses informations (livres, mails, discussions avec les PNJ), le joueur peut se forger son opinion, les options proposées ne sont jamais manichéennes. Aucun camp ne possède la vérité absolue, chaque position se défend, ce qui vise à accompagner le joueur sur le chemin où une fois à destination, il devra prendre LA dernière décision, qui impactera le reste de l'humanité.
Le joueur se retrouve donc avec toutes les cartes en main pour se forger une idée, n'étant pas limité aux informations "officielles" transmises via les journaux écrits ou télévisés croisés, mais ayant accès aux secrets et grands décideurs dans le débat sur les augmentations. La fin du jeu (SPOILER!!!) est ainsi relativement ironique, le joueur ayant bénéficié d'une grande liberté se retrouve à décider de la "vérité" à diffuser au reste du monde. Celle-ci étant trop complexe et difficile à accepter, elle se retrouve réduite en trois scénarios, chacun proposant une vue différente sur les augmentations et leur impact sur l'évolution humaine. Une quatrième option est même possible, si le joueur ne souhaite pas imposer ses idées, et mais laisser le même libre arbitre aux autres hommes.
Mais l'intérêt de cette réflexion est de s'étendre hors du jeu. L'existence de prothèses aussi perfectionnées, ne palliant plus seulement un handicap mais offrant de nouvelles facultés, ne sera probablement plus de la science-fiction d'ici quelques années mais une question de société. L'affrontement entre pro et anti, les conflits industriels, les problèmes de santé, d'addiction et de rappels de composants, le rapport à l'évolution naturelle... Ces points sont abordés de manière plus ou moins poussées dans Deus Ex HR, et appuyées dans le DLC The Missing Link qui s'attarde sur l'expérimentation humaine et même l'objectification du corps et de l'esprit, ne devenant plus qu'un composant dans un super-ordinateur.

Pour qui s'y attache, le fond s'avère extrêmement riche, ce qui entraîne une certaine déception avec les fins expédiées en 3 minutes. Heureusement, un DLC permet de se replonger dans cet univers et creuser certains éléments restés en suspens, et quand on se dit que le jeu est un prequel, cela donne envie de se lancer enfin dans le Deus Ex original, afin d'identifier les liens et références entre ces deux titres.
Niveau jeu en lui-même, il m'a donné envie de re-essayer les Metal Gear Solid: vu que ma première partie de Deus Ex HR a duré au moins 40 heures (passées à me cacher et avancer accroupi), j'ai enfin la patience de jouer furtivement. Mais seulement une fois ma deuxième partie de Deus Ex HR terminée, il me reste deux trophées PS3 à débloquer (saleté de hacking raté et de livre oublié dans ma première partie...). Et Adam Jensen est vraiment trop classe, même en VF. Et j'ai envie de sortir le shotgun et être désagréable avec tous les PNJ cette fois. Et ne pas me prendre la tête à sauver Malik.

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