jeudi 30 juin 2016

Ico - Les loges du vide

The Last Guardian arrive! Arlésienne moderne du jeu vidéo, le dernier projet de Ueda Fumito doit enfin enfin arriver sur nos consoles après 10 ans d'attente, une lente plongée dans le coma, puis une résurrection à l'E3 2014 avant de traîner jusqu'à fin 2016. C'est l'occasion de revenir aux origines du projet Trico, avec le premier jeu de cette trilogie, Ico.

 
Titre culte de la Playstation 2, j'avais récupéré une version boîte au prix fort sur eBay il y a plusieurs années, quand ma première PS3 rétro-compatible me donnait l'occasion de rattraper quelques années de retard sur des perles du jeu vidéo. Guidant le jeune garçon cornu Ico à travers un château fantomatique, il fallait s'en échapper avec la jeune Yorda, rencontrée en route et possédant des pouvoirs recherchés par une reine sorcière.
 
J'avais été frappé à l'époque par cette atmosphère très dépouillée, avec des protagonistes presque écrasés par la taille des lieux et la sensation de vertige, similaire à celle éprouvée devant Le Château dans le Ciel de Miyazaki Hayao. La musique est discrète, les dialogues peu nombreux (et de plus incompréhensibles pour la langue de Yorda), renforçant l'impact des quelques passages de combats contre les ombres, cherchant à enlever la jeune fille. Car malgré la compréhension orale impossible avec l'héroïne, on se prend d'affection pour elle avec la mécanique consistant à lui tenir la main pour la guider, ou faire des grands gestes pour l'inciter à sauter au-dessus du vide et la rattraper in extremis. Chaque combat est partagé entre la nécessité de détruire ces ombres, et sauver Yorda et sa fâcheuse tendance à être aspirée dans une autre dimension.

Mais en reprenant le titre dans sa version HD pour PS3, j'ai eu beaucoup de mal à retrouver le charme de ce titre par delà son gameplay d'un autre temps (2001 tout de même): les contrôles ont une certaine latence, la physique des coups est peu précise, les sauts sont plutôt hasardeux. L'univers était toujours le même, mais face à d'autres expériences vidéo-ludiques connues entre temps, je pense être devenu plus attaché à la jouabilité. L'originalité de ce monde onirique est passée, et les accrocs ou autres précisions dans les commandes brisent l'expérience, comme un réveil brutal au milieu d'un rêve.

Qu'en sera-t-il pour The Last Guardian, en gestation durant une décennie? Sera-t-il lui aussi victime de mécaniques issues d'un autre temps, malgré qui s'annonce tout autant singulier que ses aînés? D'ici là, il va falloir que je me remette également à Shadow of the Colossus, l'appel des cavalcades avec Agro se fait entendre.

dimanche 19 juin 2016

The Secret of Monkey Island - So You Want to be a Pirate?

L'aventure c'est l'aventure, et au basculement dans la dernière décennie du vingtième, elle s'appellait LucasArts, et faisait la joie des possesseurs d'Amiga 500, Atari ST ou même des pécéistes qui découvraient les joies des écrans VGA aux 256 couleurs. De mon côté c'était encore l'Amstrad CPC ou les consoles 8-bit des copains, mon seul contact avec ces titres était via les tests, captures d'écran et solutions dans les magazines de jeux vidéo. Triste enfance, mais le progrès (et le commerce de la nostalgie) fait revivre ce titre sur les consoles récentes, avec ce remaster de The Secret of Monkey Island.
Guybrush Threepwood veut devenir un pirate. Gentil garçon un peu naïf, il débarque sur l'île de Mêlée pour des épreuves initiatiques mais va croiser amour, voodoo et danger dans sa quête, s'aventurant sur la mystérieuse Île du Singe (tada...).
Sorti en plein âge d'or des jeux d'aventure point-and-click, alors que LucasArts est en pleine pente ascendante, le jeu affine le genre après Zak McKracken, Maniac Mansion et Indiana Jones and the Last Crusade (pas le jeu d'action moisi, hein), avec à l'écriture Ron Gilbert et Tim Schafer (toujours actifs sur des projets en mode kickstarter).
Pour cette édition façon remaster, les commandes à base de verbes à cliquer sont remplacées par des raccourcis sur la manette (pas forcément intuitifs), les graphismes fourmillent de détails (très bien pour les décors, mais le design des personnages n'est pas toujours heureux avec une animation raide) et les dialogues sont entièrement doublés. A tout moment il est possible de revenir sur la version d'origine, qui garde un charme certain (même si jouer avec une manette PS3 est bien moins pratique qu'avec une souris).
L'intrigue et les énigmes n'ont pas été modifiées, les associations chelous d'objet et actions ridicules sont toujours là. N'ayant pas joué au titre à l'époque de sa sortie, je n'ai pas été retourné par cette légende du jeu vidéo (contrairement à mon chouchou Sram sur CPC qui a marqué ma jeunesse), mais certaines parties font mouche pour le noob que je suis, en particulier avec les combats à base d'insultes (même s'il faut être patient pour apprendre toutes les répliques), et les personnages sont attachants, avec un renversement de certains archétypes (Guybrush et Elaine en tête).

J'ai été un peu déçu par le final, vite expédié, mais j'ai apprécié la découverte de ce titre et son univers, une belle occasion de se replonger dans l'histoire du jeu vidéo.

vendredi 10 juin 2016

Demon's Souls - All Nightmare Long

Je me le répète constamment, je n'ai pas assez de temps pour me poser sur tous les titres auxquels je souhaite jouer. J'ai une longue liste de jeux en attente via mon abonnement PS+, et certains de ses titres sont même déjà téléchargés et installés, prêts à être lancés une fois que j'ai trouvé la motivation pour 20 heures ou plus sur une aventure.
Mais je n'avais jamais eu un tel cas où la seule réputation d'un jeu laissait supposer que j'allais souffrir et en baver pour ne serait-ce qu'en saisir la saveur. Et pourtant, quelle magnifique aventure s'offre avec Demon's Souls.
Précurseur de la série des Dark Souls (et Bloodborne) qui a depuis fait la renommée du studio FromSoftware et du créateur Miyazaki Hidetaka, le titre pose des bases que les joueurs avaient semble-t-il oublié avec l'évolution du gameplay sur les années 2000, les tenant de plus en plus par la main: ici, un tutorial basique, peu d'indications pour les directions à suivre ou le scénario, et une sensation d'impuissance dans les premières minutes face à un monde qui nécessite une attention de tous les instants. L'introduction de Demon's Souls pose le ton, avec quelques ennemis qui vident joyeusement la barre de vie alors que l'on découvre les commandes, avant de tomber sur un boss qui dégomme notre personnage en un coup.

Ressuscitant sous forme spectrale, le joueur découvre le monde de Bolétaria dans un piteux état, et va devoir remettre de l'ordre dans tout ça en tuant des monstres, en récupérant des âmes perdues pour acheter des niveaux, des armes ou des sorts, et en mourant régulièrement. La mort au moindre tournant est la promesse de base de la série des Souls, et celle qui m'a longtemps fait hésiter avant de m'y laisser. Et en effet après deux premières heures plutôt rudes (et l'aide de vidéos sur YouTube), j'ai commencé à saisir l'essence du titre.

Finis les jeux où l'on explore en taillant d'un coup les premiers ennemis, ici il faut attaquer individuellement, la présence de deux soldats nécessite d'en isoler un, lui tourner autour avec son bouclier levé, esquiver ou attendre l'ouverture, et frapper. Une ou deux fois grand maximum, il faut rapidement remettre sa garde et reprendre l'affrontement en avançant mètre par mètre, chaque erreur étant chèrement payée, avec son lot d'âmes perdues et à récupérer au prochain passage.

Le principe peut paraître lourd, mais il s'avère extrêmement viscéral, avec cette sensation d'évoluer dans un monde cohérent, bien que peuplé de dragons, squelettes et autres saloperies bien flippantes au détour d'un couloir. Le design y fait pour beaucoup, avec un vrai souci pour créer des chemins à travers des forteresses, mines ou donjons. Chaque nouvel ennemi nécessite un temps d'observation afin de juger son comportement, et trouver la bonne tactique pour l'affronter. Ou l'éviter, comme cet ennemi courant dans les marais avec son hachoir géant alors que je pataugeais dans la gadoue...

Chaque jour, j'attendais avec impatience le retour devant la console pour avancer dans ce monde où l'espoir semble perdu, mais la découverte d'un trésor, d'une arme ou d'une tactique est une victoire, avec le sentiment du devoir accompli. Comme tout bon RPG, les statistiques du personnage augmentent avec les niveaux engrangés, mais la véritable expérience provient de la maîtrise par le joueur, sa connaissance du monde et de ses ennemis: chaque mort est une leçon pour passer au-delà au prochain passage, et affronter une nouvelle difficulté.

En jetant son joueur sans repère dans un monde inconnu, Demon's Souls ne fait qu'adapter la formule du premier Zelda où le jeune Link devait tracer son chemin à la force de l'épée et du bouclier. Plus de vingt ans après, FromSoftware a ramené le RPG-action à ses bases, remettant le joueur en avant, et non son avatar surpuissant. Un petit sentiment de vide se fait sentir une fois l'ordre revenu sur Bolétaria (ou pas), l'écoute des musiques alors que j'écris cet article me rappelle des moments fabuleux. Il faut que je me lance dans les trois Dark Souls à présent. Et leurs DLC. Et Bloodborne...