lundi 28 mars 2016

Broforce - America, fuck yeah!

L'humour est un art difficile: pour toucher juste, il faut maîtriser son sujet, son auditeur et ses effets. Et si parfois une couche de second degré ou d'ironie semble apporter un côté rebelle et je-m'en-foutiste, il faut tout de même maîtriser les bases pour être sûr de son succès. Peu de jeux prennent la direction de la surenchère à tout va, avec les risques de manquer leur but: Broforce fait partie de ses fous, engagés sans forcément savoir où ils vont.


Parodie/hommage aux films d'action des années 80, Broforce est un jeu de tir à la mode rétro (pour ses pixels et son gameplay), rappelant fortement les classiques Contra/Probotector/Gryzor, dans lequel le joueur débloque progressivement différents "bros" aux caractéristiques différentes pour défoncer du communiste, de l'alien et du démon par paquet de cents. Au milieu d'un joyeux bordel d'explosions et de réactions en chaîne souvent fatales pour leur initiateur, on s'amuse à retrouver les références très évidentes à des héros emblématiques des années Reagan (avec des Rambo, Chuck Norris, Mister T. ou John McLane à peine renommés) ou à d'autres qui semblent s'être perdus dans le casting (McGyver? Neo de Matrix?), et à tracer à travers les niveaux devenant rapidement des champs de mine pour tout élément qui bouge.

Au départ on ricane gentiment des punchlines et clins d'oeil, et on se prend la tête sur des boss gigantesques dont la barre de vie semble bien trop longue. Mais les bugs prennent le pas sur la fête de l'hémoglobine, avec un perso qui se fige deux secondes après le début d'un niveau ou des r.a.l.e.n.t.i.s.s.e.m.e.n.t.s inacceptables dès que cela s'agite dans tous les coins de l'écran, à croire que la PS4 est mise sur les genoux par 10 pixels en train de sauter joyeusement. Et on apprend à composer avec, jouant du timing et de la pause en début de niveau et esquivant les projectiles en mode 5 images par seconde.

Et alors que les niveaux standards finissent par se ressembler dans leur approche "je fonce vers le drapeau de fin", des missions solos dédiées à des personnages précis apportaient de la diversité et un renouvellement du gameplay, forçant le joueur à s'adapter au caractéristique du bro du moment et sa vie unique. Mais magie des bugs, ces missions ne s'activent pas comme attendu sur la carte de sélection. Dommage car les quelques missions testées avec les Rambo et McGyver de service nécessitaient une "réflexion" absente du reste du jeu, avec la nécessité de planifier ses actions et leurs potentielles conséquences.

La blague semblait bonne à l'origine et invitait le joueur sur de bonnes références, mais la qualité du jeu a été oubliée en route. Ce n'est pas un raté total vu certains moments de bravoure sont toujours possibles, mais il en ressort le sentiment d'un titre qui aurait pu être bien plus que ce qu'il est, s'attachant plus à sa forme qu'à son fond.

mercredi 23 mars 2016

Transistor - I See Red


Le rétro est à la mode. On revient en arrière sur des souvenirs rassurants, sur des périodes qui semblaient meilleures ou plus simples à comprendre. Dans le jeu vidéo, cela se traduit essentiellement par l'aspect technique et les mécaniques de gameplay (comme dans le très bon Axiom Verge), mais bien plus rarement dans un cadre historique relativement proche de nous (comme les années 20 dans le bancal Contrast). C'est bien dommage car il y a matière à s'inspirer de ces périodes peu explorées, et de les revisiter avec un twist, ce qui est le cas de Transistor.
Le jeu nous met dans la peau de Red, célèbre chanteuse de la ville de Cloudbank, se réveillant muette après s'être retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment. Auprès d'elle, un cadavre, et une épée parlante, la Transistor. Celle-ci a absorbé la conscience de l'homme mort, et va guider Red à travers les rues pour retracer le fil des évènements, au milieu de parasites électroniques semblant faire bugger la ville.

Action-RPG, Transistor propose un système très intéressant de simili tour par tour, déclenchable une fois la jauge pleine, permettant de planifier ses attaques, liées à différentes fonctions récupérées au fil de l'aventure. Les emplacements étant limités, il faut choisir les fonctions/actions à garder à disposition, stock que l'on détermine par son style de jeu. Assez obscur sur les premiers affrontements, le système se révèle très riche une fois les premiers défis affrontés (sortes de tutoriels déguisés), je me suis mis à tracer mon chemin à grands coups de triples Void() pour réduire les défenses et de Bounce() + Spark() pour de gros dégâts.

Le jeu a le bon goût d'être relativement court, tout en ayant un réel intérêt à être refait une fois ses subtilités saisies, laissant ainsi l'occasion de mieux saisir son histoire. Assez simple et rythmé efficacement, elle offre tout de même son lot de surprises, avec une ambiance désespérée de fin de reigne qui se ressent tout autant dans les boss que dans l'héroïne, avec une conclusion que je devinais, et que le studio Supergiant Games a osé mettre en place.

Mais ce frappe certainement le plus est la direction artistique: le design de la ville et des ennemis, les trop rares illustrations plein écran de Red, le background qui reste très suggéré et non forcé au joueur, tout semble converger pour susciter un état d'abandon, de mélancolie et résignation autour de l'héroïne. Et les superbes musiques mélangeant électro et mélodies traditionnelles confirment le destin inéluctable de Red.

La fin douce-amère pose certaines questions, avec une fuite dans un monde meilleur et l'abandon d'une réalité condamnée par une technologie devenue incontrôlable. Cela semble faire écho à certaines choses, mais lesquelles? Je ne sais point...